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Interview : Mat Bastard (Skip The Use)

Interview : Mat Bastard (Skip The Use)

A l’occasion de la sortie d’un nouveau single, Human Disorder, on a discuté avec Mat Bastard, le chanteur de Skip The Use. Entre questionnement de notre époque, frustration et énergie créative, il nous raconte son chemin jusqu’à la création de ce titre annonciateur d’un album pour 2022. Sans oublier bien sûr, la scène, marque de fabrique du groupe !

Hello, merci beaucoup de nous accorder cette interview ! Après deux ans d’absence, Skip The Use est (enfin) de retour ! Comment vas-tu et comment va le groupe ?

On est encore vivant, c’est déjà pas mal ! Franchement ça va, comme tout le monde, on s’est pris la crise en pleine figure donc ça n’a pas été simple mais on a essayé de transformer la difficulté du moment en énergie créatrice et de développer de nouvelles idées et concepts. Tout ce qu’on a fait a été le fruit d’une volonté de changement, on s’est nourri de cette frustration, cette peur pour essayer de construire quelque chose de plus lumineux.

Donc pendant ces deux ans tu as créé !

Oui j’ai créé dans tous les sens du terme, j’ai fait de la musique, j’ai monté une entreprise de production et je produis une émission urbaine sur France 2, je fais pleins de trucs ! Habituellement, la scène me prend beaucoup de temps donc quand on me l’enlève je la remplis par autre chose !

Peux-tu nous parler du nouveau single de Skip The Use, Human Disorder ?

Je ne sais pas si c’est mon âge mais quand il y a eu la crise et que tu te retrouves enfermé chez toi, tu fais un bilan et tu te rends compte que tu dépends de beaucoup de choses. Et en même temps, tu maintiens le contact grâce aux réseaux sociaux avec tes fans, ta famille et tes amis. J’ai toujours été un peu en retard, volontairement, par rapport à cette mouvance là. J’ai fait un peu le même constat qu’Orelsan en écoutant son dernier album, “on est à un carrefour de société, on a le choix entre plusieurs routes et on arrive à un moment donné où il ne faut pas trop se planter sur la route qu’on va prendre.” Cette chanson parle de ça, on est dans un monde où aujourd’hui tout le monde est spécialiste de tout. Tout le monde est médecin, virologue, critique musical, critique littéraire, politicien, philosophe…

Aujourd’hui quand je sors un single, je vais poster sur mes réseaux sociaux et des gens vont commenter, faire des critiques sous couvert de l’anonymat parfois positives d’autres négatives – c’est hyper nouveau. Je ne dis pas que c’est mal mais c’est un vrai changement. Dans beaucoup de médias, les journalistes demandent “tu valides ou tu ne valides pas ?” sur n’importe quel sujet sans qu’ils ne soient forcément légitimes de répondre. Ce concept m’a fait rire et la chanson part de ça. Quand je dis “overrated”,”underrated”, je reprends ce concept et j’essaie de le retranscrire sur des questions plus existentielles.

 

On ne parle plus de futur, on n’utilise plus le mot avenir… Les films futuristes ce n’est que des scénarios catastrophe. Je me mets à la place de la jeunesse d’aujourd’hui qui peut se dire pourquoi tu veux qu’on se batte de toute façon puisqu’on est morts… Mais on peut retourner vers quelque chose de plus lumineux, ensemble, par de petites actions. Il y a une frange de la jeunesse qui en a conscience mais il faut qu’on soit beaucoup plus nombreux et je comprends que l’album d’Orelsan fasse un carton parce que justement il parle de ça. Human Disorder c’est un condensé de tout ça. Comme d’habitude avec Skip The Use c’est la prise de position, c’est susciter le débat mais ne pas être alarmiste.

Cette atmosphère que tu décris, penses-tu qu’elle est propice au retour du rock ?

Vu le climat actuel, il y a tout pour faire du rock’n’roll. L’album d’Orelsan est hyper rock’n’roll, faire un disque comme ça quand tu es sur le toit du monde du rap… Faire du rock c’est être en dehors de la ligne jaune, quelque soit ta ligne jaune ! C’est ce dire, je suis un être unique et je vais être fière de mes singularités quitte à ne pas me faire valider par une communauté.

L’album qui arrive au printemps 2022 sera dans cette même veine ?

Je pense que c’est le disque qu’on a le plus abouti, c’est le meilleur album que l’on ait jamais fait car c’est celui où on a été au maximum de notre concept. Il y a pleins de choses, on s’est remis nous même en danger, on s’est posé des questions et fait des choses qu’on n’avait jamais faites. On a des chansons en français, on a des émotions qu’on n’avait jamais mises en avant et en même temps on n’a pas perdu nos fondamentaux, tout en allant beaucoup plus loin que ce qu’on faisait avant. Je suis très content car c’est un disque qui va nous permettre de passer un step en live, d’envoyer encore plus et de nouvelles émotions. Ça va être très cool de défendre ce disque !

Je pense que c’est le disque qu’on a le plus abouti, c’est le meilleur album que l’on ait jamais fait car c’est celui où on a été au maximum de notre concept.

Tu parles du live, c’est justement la base du groupe. D’ailleurs les personnes qui vous découvrent en live vous catégorisent comme groupe de rock alors que ceux qui prennent le temps d’écouter se rendent compte qu’il y a pleins d’influences différentes. Tu penses que cet album fera le même effet ? 

J’espère que les gens vont nous suivre dans nos aventures et émotions. Il y a des chansons très personnelles et intimes dans cet album et il y en a qui sont très frontales et directes. Il y en a qui font rire, qui donnent envie de danser et d’autres qui portent à réfléchir. C’est un album à l’image de la vie et nous on a toujours été comme ça, on a toujours été multiple.

C’est un album post-crise en quelque sorte ?

Oui, c’est vraiment un album post-crise parce qu’on voulait faire quelque chose de lumineux parce que quand tu allumes ta télévision tu as envie de te pendre (rires). Ça fait 25 ans que je fais des concerts, ça fait 25 ans qu’on ne me prend pas au sérieux quand je parle de vivre ensemble. Qu’il y ait 100 personnes ou 50.000 ou 100.000 personnes, je dis toujours aux gens ça fait 45 minutes qu’on est ensemble à faire un concert, on rigole, on pleure, on réfléchit – tu fais ça avec ton voisin sans faire attention à sa couleur de peau, sa sexualité, son genre, son statut social donc c’est possible. A partir du moment où je vois ça tous les soirs j’ai envie d’y croire et je fais des disques qui parlent de ça.

On s’est nourris de cette frustration, cette peur pour essayer de construire quelque chose de plus lumineux.

Tu as déjà des dates de prévues avec le groupe ?

Oui, il y a des scènes qui sont en train de se booker, on est super content, on a un bon accueil. On va faire beaucoup de concerts en 2022 !

Quel est ton meilleur souvenir de scène ?

J’en ai beaucoup… On a sorti une chanson qui s’appelle Etre heureux dans notre album Little Armageddon, c’est notre première chanson en français et ça nous tenait très à cœur. Je me souviens qu’on a fait un concert, je ne sais plus dans quel pays mais ce n’était pas en France – on était en tournée avec Muse. Dans le public il y avait plein d’inscriptions en anglais un peu partout et dans la langue du pays. Et à un moment au milieu de 50.000 personnes, il y avait une femme qui a brandi une pancarte où il y avait marqué “Je suis heureuse” en grand et on s’est dit rien que d’avoir cette petite pancarte à ce moment là, ça justifie tout notre travail. Cette femme on l’a rendu heureuse pendant 5 minutes et c’est ça aussi notre job !

 

Pourrais-tu nous partager ton dernier coup de cœur musical ?

J’écoute beaucoup de techno, c’est la musique que j’écoute le plus. J’en fait pas mal avec ma femme, c’est vraiment mon truc. Le dernier titre de Charlotte de Witte, The Age of Love qu’elle a fait avec son futur mari Enrico Sangiuliano, j’adore cette chanson. Tout y est, tout est dans ce titre ! J’adore cette artiste, elle a une sorte d’humilité et de simplicité qui me parle. J’engage les gens à aller la voir même pour ceux qui n’aiment pas la techno.

Un mot pour conclure ?

Merci et vive la réalité ! Je n’ai jamais eu de meilleurs moments que dans la réalité, je ne m’en suis pas rendu compte tout de suite mais c’est quelque chose d’incroyable. Les moments simples de la vie que l’on voit dans les concerts, dans les interviews, dans nos rencontres font que la vie est cool !

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