Nous avons eu la chance d’assister à l’avant-première puis la release party de Sound of Surfing, et d’interviewer l’équipe de ce projet dingue mené par le talentueux Molécule. Retour sur ces moments
On vous l’avait annoncé, Molécule revient avec une aventure sonore exceptionnelle !
L’objectif paraissait simple au début : enregistrer le son des vagues de Nazaré – parmi les plus impressionnantes au monde – afin de composer son nouvel EP éponyme. Mais bien que le musicien soit habitué aux projets à risque (de 60°43’ Nord à -22,7°C), les conditions techniques et sécuritaires extrêmes l’ont rapidement ramené à la réalité :
Quand on a mis le projet en place, on s’est aperçu que c’était finalement une logistique assez compliquée. Il fallait travailler avec des gens qui connaissent les lieux et les surfeurs de gros pour capturer le son de cette vague. Je n’en étais pas capable seul […] Ce projet est celui qui m’a le plus mis face à mes limites. Être sur le spot est très risqué, il y a un réel danger.
C’est ainsi que le musicien s’est entouré des meilleurs : les talentueux surfeurs Othmane Choufani, Benjamin Sanchis aka Sancho et Alex Botelho. Équipés de différents micros, ils sont allés à la recherche du son le plus pur et le plus naturel. Pour autant, Molécule n’a pas manqué à sa soif d’aventure en allant lui aussi capturer le son au plus près de la vague, aux côtés du pilote de jet-ski Yann Benetrix qu’on ne présente plus dans le milieu du surf de grosses vagues.
Le film ne montre pas uniquement l’équipe en action lors de cette capture sonore ambitieuse, mais bien plus l’évolution du musicien dans sa démarche, et comment cela a pu aboutir à cet EP inédit. « J’arrive sur ce projet pas du tout préparé à affronter cela physiquement et mentalement. Je me prends en pleine gueule un truc complètement dingue. », et de là débutera une expédition sonore démentielle.
Une aventure collective
Sound of Surfing, réalisé par Julie et Vincent Kardasik, retrace la mise en place de cette création musicale, à la rencontre de deux mondes : le surf de gros et la musique électronique. Entre prouesses techniques et images aériennes à couper le souffle, c’est avant tout une aventure profondément collective que nous proposent les deux réalisateurs de LK RTEL, durant ces 45 minutes que l’on ne voit absolument pas passer.
Alors que ses précédents projets étaient plus solitaires, Molécule admet, « C’est un projet qui respire l’aventure humaine collective, le film le montre bien. C’est ce dont je suis le plus fier finalement ». Cette complicité se ressent autant à l’image qu’à l’écoute, et c’est sans doute ce qui donne un caractère si unique au projet dans sa globalité.
Othmane Choufani, surfeur émérite, découvrait avec nous le documentaire et semblait tout aussi enthousiaste : « C’est la première fois que je voyais le film, c’est incroyable. La façon de retranscrire les émotions, la volonté de chacun de bien faire, l’explication entre notre monde et ce monde, il y avait tout ».
Face aux vagues de Nazaré
Et pourtant, tout n’était pas joué d’avance. Se confronter aux vagues de Nazaré, dans lesquelles très peu de surfeurs dans le monde osent s’aventurer, semblait irréalisable. Vincent Kardasik le concède, « Je pensais que ça allait être trop compliqué et qu’il n’arriverait pas à faire ses morceaux. A Nazaré on voit toute les grandes productions se casser la gueule. C’est le pire endroit de la Terre. Tout le monde perd du matériel, on peut dépenser son budget pour rien, c’est imprévisible. »
Malgré les rires et l’ambiance bon enfant, la tension et la peur restent omniprésentes à Nazaré. Mais ces sensations sont aussi indispensables car source d’inspiration pour le musicien « Ce qui m’intéresse c’est d’être dans l’émotion, de flirter avec le danger. Ce sont de belles situations. Que ça soit d’être complètement isolé sur la banquise, en pleine tempête sur un bateau coupé du monde, en jet-ski sur le spot de Nazaré, on ressent des choses très particulières. »
Des sons à l’EP
Une fois la chasse aux sons terminée, Molécule nous raconte comment il est arrivé de cette matière brute à la composition de l’EP. A partir de cette « banque sonore », il a pu s’imprégner, reconstituer et travailler sur les différentes ambiances qui en ressortaient.
J’ai un tapis d’enregistrements qui appelle des notes, et je construis à partir de cela. J’isole les sons, les édite puis viens préciser mes intentions.
Du bruit sourd de l’explosion des vagues, aux clapotis de l’écume en passant par les rires d’après-sessions, la composition se construit pour fournir un EP complet et très fin dans son intention musicale.
On a tous pris une claque quand on a écouté l’EP pour la première fois en septembre, c’était tellement nous. Dans le morceau du générique de fin [Praia do Norte] on s’est retrouvés. Je suis censé être réalisateur du projet mais en fait c’était Molécule le vrai documentariste. Je ne m’attendais pas du tout à ça quand j’ai vu le résultat. – Vincent Kardasik.
La rencontre touchante entre deux mondes
Sound of Surfing était présenté comme la rencontre entre deux mondes inconnus. Effectivement, le film présente ce fossé qui semblait séparer le musicien des surfeurs de gros au début, non sans humour parfois (sans spoiler, le documentaire vaut le détour ne serait-ce que pour les interventions du sulfureux Benjamin Sanchis).
Ce qui m’a le plus marqué était de voir [Molécule] qui n’avait rien à voir avec le surf de gros, repousser ses limites et s’adapter. Du jour 1 au jour 3, son discours a évolué avec nous. Il n’est pas fou, c’est un junkie d’adrénaline, il a besoin d’aventure et nous aussi. Sauf que lui son monde c’est la musique et nous c’est le surf. – Othmane.
Deux mondes différents, certes, mais les passerelles sont d’autant plus évidentes. La recherche d’adrénaline, l’envie de se sentir vivant, le défi mais aussi le partage sont des éléments que l’on retrouve tant dans la démarche de Molécule (et la musique électronique de manière générale) que dans le surf. Cette convergence des intentions permet ainsi de donner un œil (et une oreille) neuf et candide dans la façon d’appréhender ce milieu assez méconnu du grand public qu’est le surf de grandes vagues. Dans sa démarche « d’humanisation du surf », l’équipe de LK RTEL a très justement saisi l’opportunité de ce projet, et résultat des courses : cela fonctionne.
Vincent Kardasik le résume bien : « Il a foutu le bordel dans notre façon de travailler et ça a marché. ».
Finalement, on ne peut être que conquis par la pertinence du projet, du documentaire à l’EP. La release party au Rex qui suivait l’avant-première en était l’apothéose. Le temps d’une soirée, les vagues de Nazaré se sont emparées du club pour le plus grand bonheur du public transporté.
Pour ce qui est du futur, l’équipe fait savoir sa motivation de prolonger le projet à long terme en documentant d’autres vagues mythiques autour du globe (le mur de Jaws à Hawaï, Teahupoo à Tahiti, …), et on a déjà hâte.
Bonjour,
Comment peut on voir le film en entier ?
Merci !