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Interview : INNOCNT

Interview : INNOCNT

Crédit : Margot Berard

Talent à suivre de TRÈS près ! Innocnt vient de dévoiler son premier EP Six. 6 morceaux conceptuels décrivant une seule et même relation, qui plus est… la première ! De la soul, du rock, de la country, INNOCNT ne s’impose aucune limite dans ce premier essai décriant sa peine, sa douleur, tout comme sa toxicité et sa destruction. Un projet vulnérable guidé par cette relation ambiguë. Rencontre. 

Salut Antoine comment ça va ?

Salut ! Ça va très bien !

Il y a à peine une semaine tu jouais à la Boule Noire à Paris pour ta release party. Comment c’était ?

Incroyable, c’était ouf ! J’ai des amis qui sont venus de partout ! La salle était remplie et ça c’était un défi puisque c’était mon premier concert à Paris.

En quoi ça a été un défi pour toi ?

Quand tu commences en tant qu’artiste c’est souvent ta famille, tes potes, tes potes de potes… Donc ce réseau-là je l’avais à Bruxelles mais à Paris c’était plus compliqué. Mais on la fait !

Et c’était même archi complet puisque vous avez refusé du monde à l’entrée ! Pour parler de ton projet, INNOCNT est ton nom de scène, comment l’as-tu choisi ?

Innocent – avec le e – c’est tout simplement mon nom de famille. J’ai décidé de choisir ce nom depuis mai dernier. Auparavant c’était vraiment « Antoine Innocent ». J’aime bien avoir une séparation entre qui je suis et moi en tant qu’artiste même si mes chansons restent honnêtes et racontent mon histoire. J’aime garder cette couche de protection mais je voulais que ça reste proche de moi, j’aime beaucoup mon nom, et je viens d’une famille très musicale, j’avais envie de me distinguer et d’enlever le e tout simplement.

On va en parler de ta famille justement. Tu es né en France, puis tu as grandi à Ottawa et maintenant tu vis à Bruxelles. Qu’est-ce que tout cela t’as apporté culturellement ?

Beaucoup beaucoup de choses ! Le Canada on te pousse énormément à être la meilleure version de soi-même, même si ça rentre par forcément dans les codes de la société. Ça m’a énormément poussé dans ma carrière, surtout de me donner les moyens d’y arriver. Bruxelles c’est ma ville, j’y ai vécu toute mon adolescence, c’est là où j’ai vécu le plus d’histoires, tout mon EP s’est passé là-bas. Bruxelles c’est une ville que je n’ai pas vraiment choisie mais qui me représente totalement.

Tu le disais tu viens d’une famille très musicale. Ton père est chanteur, tu le suivait notamment en tournée. C’est lui qui t’as donné cet amour pour la musique ?

Oui mon père m’a totalement donné ce goût de la musique. Il est américain et il tourne pas mal aux Etats-Unis. Il chante dans des festivals, dans des petites salles, etc… En général moi je le rejoignais l’été. Il était souvent dans le coin de Chicago, New-York, Virginia… En fait chaque week-end on allait en festivals, petit à petit vers 12 ans j’ai commencé à vendre les CDs, puis à monter sur scène avec lui pour faire des « minis-duos ». Je commençais déjà à prendre le goût de la scène !

Tu écrivais déjà à ce moment-là ?

C’est ça qui est cool ; mon père n’écrit pas ses chansons. Cet amour pour le storytelling ça vient vraiment de ma mère. Elle est fanatique des livres et des histoires en général. Son rêve c’était d’écrire des livres. Quand j’étais petit elle me racontait beaucoup d’histoires en prenant différentes voix. À force de me raconter des histoires j’ai vraiment eu envie de raconter les miennes. Mon père m’a donné le gout de l’interprétation et de la musique, ma mère la composition et l’écriture.

Justement tu viens de sortir ton premier EP Six, 6 chansons qui parlent d’une seule et même relation. La première même. Est-ce qu’il a fallu que ça se termine pour que tu commences à écrire ?

Pas vraiment. Tout ça j’avais besoin de le vivre. J’écrivais les chansons au fur et à mesure. Dans cette relation, il y a eu plusieurs breaks-up et à chaque fois on se remettait ensemble. Ce sont ces événements qui ont participé à la création des chansons. C’est 6 sentiments différents de ruptures. On se remettait ensemble 1 mois après, ou 1 semaine après. Ce sont ces nouveaux sentiments qui ont fait l’écriture. Par contre tu verras que la dernière chanson de l’EP qui s’appelle Goodbye est la chanson la plus « mature », parce que c’est moi qui suis en train de rompre concrètement.

Pendant cette relation tu es déjà musicien mais tu faisais quoi dans la vie ?

Je suis étudiant en informatique en Belgique.

Tu t’es professionnalisé à quel moment ?

Depuis 2019 mais le Covid a ralenti le projet…

C’est Haliens (voices inside my head) qui ouvre l’EP. On y découvre toute cette ambivalence, cette dualité au sein de la relation. « Haliens » qu’est-ce que ça signifie concrètement pour toi ?

Un « halien » c’est une personnification des voix dans ma tête. Le sentiment que j’avais envie de mettre en avant c’était que je changeais d’avis toutes les 30 secondes. J’étais énervé contre la personne mais à la fois j’aurais pu retourner vers la personne. Ces voix sont en débat permanent pour prendre le contrôle d’INNOCNT justement. « Haliens (voices inside my head ») » c’est vraiment les différentes voix qui se battent.

Tu parlais d’être énervé justement et on ressent cette urgence, cette envie de crier notamment sur le titre Give me your soul. Comment s’est passé l’enregistrement ?

Ça a été assez compliqué. Il a été enregistré en plusieurs fois. On a enregistré Give me your soul, Goodbye et Sober en premiers, dans un studio en Belgique, complètement en live sur bandes. On était 12/13 musiciens à jouer en live en même temps. C’était la première fois que je jouais avec des cuivres, il y avait des choristes aussi, c’était incroyable.

Une fois ces 3 premières chansons enregistrées, on s’est dit « ok on tient quelque chose, on va en enregistrer d’autres« . Et ça, ça a pris 1 an. On en a enregistré trois autres, dont Hold On mais Haliens n’existait pas encore, c’était un autre son qui était prévu mais on s’est dit que ca sonnait trop old school, ce n’était pas le son que je recherchais. Du coup on a pris les pistes et on les a modernisées avec Backdoor Record.

C’est là qu’on a trouvé le son actuel de l’EP entre quelque chose d’old school toujours mais avec de la modernité. C’est là que j’ai mis Haliens à la place de l’autre chanson.

L’EP se poursuit avec Sober, une des pistes les plus émouvantes de l’EP où tu tentes de faire le deuil suite au décès de ta meilleure amie tandis que ta relation continue de s’agiter. Tu te souviens de l’écriture de ce titre ?

Complètement ! Après le décès de ma meilleure amie en décembre 2018, en janvier, mon ex me dit qu’elle avait envie de partir. Je suis tombé dans une forme de tourbillon, pendant plusieurs jours j’étais vraiment pas bien. Je sentais que j’avais besoin d’écrire. Je suis devenu obsessionnel, j’écrivais 4 chansons par jour. Chaque chanson n’était pas la bonne et en fin de semaine j’ai écrit ce titre en 10 minutes.

À la seconde où je l’ai terminé je me suis senti mieux. C’est comme si j’avais développé ma douleur sur papier, c’était impressionnant. Cette chanson on pense que c’est sur mon ex mais en fait la première phrase qui est : « Couldn’t you see that ever since she left » parle de ma meilleure amie. Et je dis à mon ex : « écoute si tu dois partir, pars mais pas aujourd’hui parce que je ne peux pas ».

L’EP est hyper riche musicalement avec du rock, de la country, de la soul et tu en parlais tout à l’heure avec ces choeurs grandioses présents sur la quasi totalité des morceaux. Tu peux nous dire qui chante et comment s’est passée la rencontre ?

Ce sont trois choristes de Belgique qui accompagnent Selah Sue de base. Mon premier arrangeur connaissait ces choristes. Elles sont arrivées, elles ont commencé à chanter et c’était fou ! Si je pouvais je partirais en tournée guitare/voix, avec des choristes !

Les filles étaient adorables, elles sont tout de suite rentrées dans le projet. Vu que c’était la première fois que j’arrangeais et produisais des chansons de cette ampleur j’écoutais beaucoup ce que les musiciens avait à me dire, leurs idées. Cet EP est très collaboratif dans l’arrangement. Il y a des phrases qu’elles ont rajoutées comme sur Sober.

A l’écoute de Mallory j’ai beaucoup pensé à Lenny Kravitz. Est-ce que c’est un artiste qui t’inspire ? Et de manière générale qui sont les artistes que tu écoutes ?

Kravitz je l’ai découvert il y a 2 ans. C’était assez marrant parce qu’on m’en parlait souvent. Et quand je suis rentré dans son univers, que j’ai écouté ses premières chansons, je me suis dit : « ah ouais effectivement« . Au fur et à mesure du temps c’est devenu une inspiration. C’est trop bizarre, c’est comme si tu découvrais une référence que tu ne connais pas et qui te ressemble énormément. Ses premiers albums sont fantastiques ! J’avais dû l’entendre à l’époque au Canada à la radio (rires). Ce n’est pas normal d’avoir une similarité dans le son sans jamais avoir entendu un morceau.

Pour mes autres références j’ai été bercé par Whitney Houston, le storytelling de Taylor Swift. Un auteur-compositeur que j’adore c’est Bruno Mars ! C’est le compositeur qui a le plus réussi dans la pop, à mettre en avant de nouvelles sonorités que ce soit le funk, la soul avec Silk Sonic, maintenant il fait de la K-Pop aussi. Il rend tout ça public et c’est impressionnant.

Pour revenir au titre Mallory tu peux nous dire exactement de quoi ca parle ?

Je l’ai écrit relativement tard. C’est très inspiré de l’histoire de Jolene de Dolly Parton. Puisque Mallory ce n’est pas la fille en question, c’est la meilleure amie Et en fait cette Mallory elle est amoureuse de ma copine. C’est un peu le même message que Dolly Parton quand je dis : « Mallory don’t take my girl away from me » par exemple. Et c’est vraiment une histoire qui m’est arrivée au début de notre histoire, c’était un peu mon ennemie (rires). 

Give me your soul retrace tes mensonges, ton obsession, une certaine toxicité. Est-ce que ça a été compliqué de te montrer aussi vulnérable ?

En écrivant, je n’avais jamais pensé à quel point c’était si vulnérable. Comme j’étais en Belgique et que j’avais la barrière de la langue (même si les gens parlent quasi tous anglais), j’avais plus de facilité à leur faire écouter car il y avait une certaine distance.

Après pour moi la vulnérabilité c’est ce que j’aime le plus, c’est mon travail. J’ai envie de mettre en avant mes sentiments et d’être le plus honnête possible pour aider les gens qui vivent la même chose que moi. Si les hommes étaient plus honnêtes il y aurait beaucoup moins de problèmes dans le monde. C’est quelque chose que j’essaie de revendiquer sur scène.

Et justement Give me your soul en studio on m’a dit : « euh la chanson est très toxique, tu ne voudrais pas changer les paroles ?« . On m’a proposé cette idée, mais c’est justement ça que j’aime : être honnête. Après la rupture j’étais égoïste, c’était comme ça, point.

T’as jamais pensé écrire en français ?

Justement non. Dans la façon de m’exprimer j’aime bien être très direct. En anglais tu peux être comme ca, en français faut que tu manipules la langue. Je ne suis pas du tout contre chanter en français, si quelqu’un arrive avec une chanson formidable pourquoi pas, mais j’écris mon histoire en anglais. Tu vois des Tracy Chapman, B.B. King, Taylor Swift c’est direct et en français tu ne peux pas faire ça !

C’est avec Goodbye que se termine l’EP donc. Est-ce qu’aujourd’hui grâce à cet EP tu as fait le deuil de cette relation ?

Écoute je pense qu’une relation comme celle-ci tu ne peux jamais t’en relever. Il y a un truc qui va rester en moi pendant très longtemps. C’est aussi mon premier amour et ça a duré très longtemps, c’est quelque chose qui m’a forgé. En plus, ça s’est fini en bons termes.

Cet EP, à chaque fois que je le chante, il faut que je le vive. Au départ c’était un peu compliqué. J’avais besoin de 2-3 jours pour me remettre dans mes baskets.

Est-ce que tu sais si la personne l’a écouté ?

Bien sur elle était même à La Boule Noire, elle m’encourage énormément !

Quoi de prévu pour la suite ?

Il est temps d’aller en tournée j’espère ! La scène c’est vraiment là où je me sens le plus en vie. Mon objectif c’est d’être sur scène. Et écrire des chansons pour finaliser mon deuxième EP afin de chanter des morceaux plus récents que ceux écrits à 19 ans ! De nouvelles histoires que j’ai envie de raconter.

Innocnt est nommé dans le TOP 100 du Prix Pernod Ricard France Live. Vous pouvez voter pour lui juste ici !
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