Rédacteur en chef, Fondateur
Il y a quelques jours, Outis nous présentait Raqqama, un premier EP sorti chez Onto Records. A cette occasion, on se devait de vous présenter ce binôme italien dont l’électro risque fort de vous transporter.
Formé par Caterina et Davide, deux musicien·nes originaires de Sicile, Outis nous plonge dans un univers électronique à la croisée entre traditions ambient IDM, influences techno et UK garage à la manière de Jon Hopkins, Four Tet, Nathan Fake, ou encore Max Cooper. Mais ce qui fait leur singularité c’est que le binôme puise son inspiration première dans leur terre natale. Ils confient :
Le choix des noms en sicilien est un hommage à notre dialecte, une langue parlée uniquement dans notre région d’origine qui cache en elle des mots uniques qui ne peuvent être traduits. La plupart des termes choisis pour les chansons ont un lien avec la nature ou avec la tradition liée notamment à la mer.
Toutefois, sorti le 16 avril dernier, Raqqama a vu le jour alors que le couple vivait en dehors de la Sicile et surtout loin de la mer. Cette distance a influencé le choix d’un rapport dialogique à la Sicile et à l’univers marin à l’instar de Sicciara qui ouvre le disque dans une longue montée introductive bruitiste et bouillonnante à la manière d’Alessandro Cortini. Le morceau, qui porte le nom de la ville natale de Caterina signifiant littéralement « ville où l’on pêche la seiche », est une plongée dans les abîmes et les eaux profondes de la Méditerranée. Bien que fortement séduits par cette piste introductive instaurant cette ambiance planante et nous invitant à laisser notre esprit voguer à l’air libre, c’est bien Riuturi, ou « le bruit de la tempête venant de la mer » en sicilien, qui a reçu notre coup de coeur immédiat. Avec ses rythmiques breakées qui viennent en soutien des mélodies aériennes du morceau, on s’est laissé transporter durant ces quatre minutes de pure transe, s’imaginant naviguer au rythme des flots le temps d’un voyage au beau milieu de contrées inconnues.
Formant un couple fusionnel aussi bien sur la scène qu’à la ville, Outis nous laisse rapidement entrer dans leur intimité, dévoilant des pistes électroniques organiques chargées d’une histoire, leur histoire, mais qui peut s’interpréter de différentes manières. L’imparable Ciatu, qui signifie « le souffle », est une tranchée techno plongeant paradoxalement l’auditeur en apnée alors qu’Annaca, qui se traduit comme le fait d’être bercé par la mer, est « une promenade à travers une forêt faite de verre où les arbres sont des sculptures de cristal et l’herbe sous vos pieds est du verre brisé » d’après les dires du binôme.
Les raisons qui nous ont poussés à vous parler de ce projet sont simples : leur musique nous est immédiatement apparue comme universelle, chargée d’une émotion positive avec un rayonnement tel qu’on termine l’écoute de cet EP les yeux fermés et le sourire aux lèvres. Mais, en plus de l’aspect sonore, Outis tient à mettre en avant l’art sous toutes ses formes, invitant l’artiste-photographe Louise Mutrel à sublimer ce premier opus déjà brillant en lui-même avec un objet-disque insolite. En découle un Uchiwa, éventail traditionnel japonais, sur lequel Louise, reconnue pour son travail de la risographie – technique de reproduction par pochoir, permettant des impressions au rendu très graphique – et la maîtrise des jeux de couleurs et de textures, a apposé une série de photos faisant un lien direct entre la musique aquatique d’Outis et son propre travail, tous deux ancrés dans le mouvement du voyage.