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Interview : Basile Di Manski

Interview : Basile Di Manski

Pour bien commencer le week-end, le Pop Up recevait Basile Di Manski pour la release party de son premier album Transworld, sorti le 14 juin.

Une fois les balances terminées, on a rejoint Basile en backstage. On a parlé de la scène trap d’Atlanta, d’auto tune, de son cursus en droit et de sa petite voix intérieure.

Aujourd’hui, sort ton premier album Transworld et nous sommes à 2 heures de ton concert au Pop Up, comment te sens-tu ? Pas trop stressé ?

Je me sens bien. J’étais stressé tout à l’heure parce que j’ai mis 1h pour venir en taxi. Le chauffeur, c’était Mad Max, un maboul. Il klaxonnait tout le temps, j’ai cru qu’il allait refuser la priorité à des poussettes ! Mais là, ça va. C’est cool ! On a fait les balances. On est prêts.

Pour ceux qui ne te connaitraient pas encore, pourrais-tu te présenter en quelques mots, nous décrire ta musique et l’univers de ton nouvel album Transworld ?

J’essaie de développer une musique rétro futuriste. Mon nouvel album  Transworld est plus futuriste que rétro futuriste. Avant, je mélangeais des influences des années 70 et 80 avec un petit peu d’électronique. La tendance s’est un peu inversée : maintenant, il y a beaucoup de textures, de sons un peu plus clinquants et produits. L’influence rétro vient davantage des années 90.

 

En effet, j’allais y venir. Sur Transworld, on sent clairement une orientation marquée plus urbaine, plus moderne (il y a beaucoup de rythmes hip hop, rnb) qu’on pouvait déjà entre apercevoir sur ton deuxième EP Personal Point Break :  pourquoi cette direction ?

Ça fait 2/3 ans que j’écoute énormément d’autotune, notamment de la trap music et cela a fini par transpirer. J’avais trouvé une recette sur mes EP précédents Personal Point Break et In Camera mais je ne me reconnaissais plus là-dedans.

J’avais envie d’autres choses et j’avais besoin de faire de la place à ma voix, de faire des instrus plus épurés, avec des beats plus malléables.

J’essaie de construire des chansons comme on construit des skates park ou des modules. Je construis une structure assez épurée. Ensuite, je vais venir me promener sur cette structure avec ma voix et faire des figures. L’autotune aide beaucoup et les intrus épurés permettent une énorme liberté vocale.

Quelles ont été tes influences pendant la composition de Transworld ?

J’ai beaucoup écouté toute la scène trap d’Atlanta (Future, Young Thug). J’ai découvert les mecs de Rae Sremmurd et notamment Swae Lee. Pour moi, c’est l’un des meilleurs chanteurs qui existe aujourd’hui. Il a une manière d’utiliser l’autotune qui laisse beaucoup transparaitre son timbre et cela m’a vraiment donné des idées.

J’ai aussi beaucoup écouté Post Malone que j’ai découvert dans un van en allant faire du surf au Maroc. Les profs l’écoutaient tous les matins en partant. Au début, je me disais « Mais c’est quoi ce truc ? ». Au final, j’ai écouté d’autres morceaux et je suis tombé sur White Iverson qui est vraiment son premier tube. J’ai dû l’écouter 32 fois de suite. A chaque fois que j’écoute cette chanson, elle me rend heureux à un tel point ! J’ai vraiment fait des rencontres avec d’autres genres musicaux et avec des styles plus actuels.

Je suis aussi à un moment de ma vie où je suis beaucoup au jour le jour et je ne suis pas du tout dans une phase nostalgique. J’avais aussi envie que ma musique me ressemble. J’avais besoin de m’affranchir des influences du passé des précédents EP.

 Comment as-tu composé ce premier album ?

C’est le premier disque que j’ai fait tout seul. Sur les deux EP, j’avais travaillé avec des arrangeurs (Nicolas Gary, Paul Prier et Bastien Doremus qui sont de très bons producteurs !). En bossant avec eux, j’ai appris des trucs que j’ai repris. Il y a aussi des choses qu’on avait faites ensemble, qu’ils m’ont aidé à pousser mais je me suis aperçu que ce n’était pas ce que je voulais. Notamment sur Personal Point Break, j’avais envie de vraies batteries mais sur Transworld, il n’y en a presque pas. Il n’y a que des sons de kit que j’ai pris sur des morceaux de rap. J’avais envie de pousser moi-même l’aspect prod parce que c’est quelque chose que j’aime bien.

J’ai composé en essayant de recourir au strict minimum : voix, beat, synthé. Toutes mes chansons sont parties d’un beat et d’une nappe, ce qui est la moindre des choses pour pouvoir chanter dessus. Je posais d’abord une nappe – un synthé, une texture – qui me mette une contrainte harmonique et je créais un beat par-dessus. Une fois que je commençais à chanter et qu’une structure apparaissait par le chant, je rajoutais des petits arrangements (un deuxième synthé, une basse …).

 

Combien de temps a duré ce process de composition ?

La composition de l’album a été longue. Elle a commencé avant la sortie de Personal Point Break et s’est étendue sur 1 an et demi/2 ans.

Mais la compo, l’écriture et l’enregistrement se sont faits sur une toute petite durée, sur un labs de temps très concentré. Faire le tri entre ce qui me correspondait et ce qui ne me correspondait pas, entre les sons que j’aimais et ceux que je n’aimais pas, entre les sons que je voulais utiliser parce que j’avais des automatismes mais que je n’aimais pas en réalité a été le travail le plus long.

J’ai écouté énormément de choses. J’ai fait ce que je n’avais jamais fait avant : passer 3h à écouter des sons. Je jetais les sons que je n’aimais pas et gardais ceux que j’aimais bien. Ceux-là, je les mettais dans un coin. Ils sont maintenant dans mon programme et je les utilise de manière plus privilégiée.

Pourquoi ce titre Transworld ?

Peut-être qu’un jour, on parlera du monde dans lequel on vit aujourd’hui, comme le transworld. On est dans une époque où toutes les règles, toutes les limites, toutes les frontières sont là pour être cassées. C’est pas du tout un jugement de valeur, au contraire. C’est même très bien à plein d’égard.

Mais j’ai l’impression qu’on est dans un monde où l’idéal se résume à une espèce de fluidité totale entre les choses, entre les gens, entre les machines et les gens, entre les machines entre elles. Tout doit être dépassé.

Mais, je pense que cela ne va pas durer ; c’est l’époque qui veut cela. On a tendance à penser que ce que l’on vit maintenant sera le monde pour toujours mais ce n’est pas le cas.

Peux-tu nous parler de la pochette de l’album où on sent également ce côté futuriste que tu évoquais ?

Pour dire la vérité, j’ai eu du mal à trouver l’artwork de la pochette. Je voulais quelque chose de conceptuel, de plus direct, qui mette moins de filtre entre les gens et moi.

Pendant le tournage du clip de Without You à Hong Kong, ma copine (qui apparait dans le clip) a pris cette photo. J’ai trouvé qu’elle collait bien à l’univers que j’avais envie de décrire.

Tu chantes en anglais. Envisages-tu un jour de chanter en français ?

J’y ai pensé. Ce n’est pas impossible mais c’est un peu tôt pour en parler. Il faut que je trouve le bon process. Quand je m’exprime en français, je privilégie l’écriture au chant.

J’ai lu que tu avais fait droit pour devenir avocat. Milieu complètement opposé à celui de la musique …

Je ne me voyais pas ne pas faire d’études car j’avais besoin d’un minimum de cadre. Mais j’ai toujours fait de la musique à la fac. Au quotidien, c’était ce qui était le plus important et le plus urgent.

Le droit m’a permis de voyager. J’ai voulu aller au bout du truc en passant le concours pour essayer de devenir avocat mais je me suis rendu compte que j’étais entouré de gens bien plus motivés que moi. J’ai fait une prépa pendant un été entier, j’ai eu l’impression de perdre mon temps comme jamais. J’ai raté le concours mais cela m’a tellement soulagé. C’est devenu beaucoup plus clair après.

J’ai ensuite bossé dans une boite de production où je me suis rapprochée de la musique. Au bout d’un an, un an et demi, j’avais appris pleins de choses et j’ai eu envie, moi aussi, d’être sur scène. J’ai ensuite sorti mon premier EP In Camera que j’avais auto produit et j’ai rencontré mon label Pain Surprises chez qui je suis toujours.

J’ai aussi lu que le cinéma t’intéressait. Peux-tu nous en dire davantage ?

C’est une lubie qui se transformera peut-être un jour en projet. Être acteur m’amuserait mais je préférerais être derrière la caméra.

Quels conseils donnerais-tu à quelqu’un qui souhaiterait faire de la musique ?

C’est une grosse question.

Aujourd’hui, on n’a plus d’excuse pour ne pas travailler. On a tous les outils disponibles pour pouvoir faire de la musique. Ma petite cousine m’a montré un solo de synthé qu’elle avait composé sur son écran d’IPhone. Si tu en as envie, tu peux faire de la musique.

Ensuite, c’est important de faire écouter un maximum et le plus vite possible ce que tu fais pour avoir et se confronter à des retours et pour apprendre à faire le tri entre les gens qui te diront des choses pas sincères ou pas intelligentes, qu’il faut mettre à la poubelle, et les autres retours qui résonneront avec un doute que tu as en toi : ces retours, il faut vraiment les écouter et les étudier.

En gros, il faut bosser, faire écouter, essayer de prendre du recul sur ce que tu fais, continuer et faire cela le plus possible sans s’arrêter.

 

Quels conseils aurais-tu aimé que l’on te donne ?

Je n’ai jamais eu de mentor. Il y a des gens qui m’ont encouragé, dont l’avis comptais mais j’aurais voulu qu’on me dise que j’étais un branleur. Une fois que t’as enregistré 5 morceaux, en vrai, tu n’as rien fait.

Je crois que le milieu de la musique ne veut pas de nouvelles têtes. C’est un milieu où il faut faire sa place et il faut travailler très dur pour cela.

Plus tu commences à travailler tôt, mieux c’est. Plus tu travailles à fond, plus tu traverses des plafonds de verre qui fait que tu auras plus confiance en toi, que ton projet va rayonner et qu’il pourra se passer des choses.

Il faut essayer d’être humble un maximum tout en écoutant sa petite voix qui nous parle et ne pas perdre le contact avec elle.

Et que te dit ta petite voix ?

J’essaie de l’écouter à chaque fois que je fais un morceau, que je fais un concert mais parfois c’est compliqué de savoir où placer le curseur entre les avis que tu reçois et ce que tu penses. Parfois, tu sais même plus ce que tu penses.

Tes pépites du moment que tu voudrais nous faire découvrir ?

Si vous ne connaissez pas, écoutez White Iverson de Post Malone. [Basile voulait nous parler d’un autre morceau mais il ne se souvenait plus du titre et n’avait plus de batterie sur son Iphone].

Enfin, où peut-on te voir jouer prochainement ?

Je jouerai au Sacré (ex Social Club) le 18 juin et à la Fondation GoodPlanet le 23 juin.

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