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Review : Orelsan – La fête est finie

Review : Orelsan – La fête est finie

Après une attente qui nous a semblé interminable, le troisième album studio d’Orelsan vient de sortir et il nous a tenu éveillé pratiquement toute la nuit. On débriefe !

Il est vrai que depuis son dernier album Le Chant des Sirènes paru il y a 6 ans, Orelsan a continué de faire parler de lui avec notamment deux excellents albums des Casseurs Flowters avec son pote Gringe, un film Comment c’est loin qui nous aura bien fait marrer et réfléchir et une série : BloquésMais rien n’égale la sortie d’un projet musical personnel ! Et c’est il y a seulement un mois qu’Orel nous a pris au dépourvus en balançant à la fois le fracassant Basique et la date de sortie ce tant attendu opus.

Un mois durant lequel les spéculations n’ont cessé d’enfler, avec notamment une tracklist dévoilée sur Twitter promettant des featurings dingues – on aurait vraiment bien aimé voir Vald ou encore Damso collaborer avec Orelsan – mais on restait assez sceptique sur sa véracité… « Si c’est marqué sur internet c’est peut-être faux mais c’est peut être vrai« Peu de temps après, il nous offrait la véritable liste des morceaux qui composent La fête est finie et elle nous laissait rêveurs ! On retrouve pas moins de 14 pistes dont des collaborations avec entre autres les deux soeurs d’Ibeyi, le petit prodige Nekfeu et Stromae ! Seul le nom de Maître Gims nous laisse un tantinet perplexe… A voir…

 

Alors… Quid de ce nouvel album ? Pas besoin d’attendre longtemps pour comprendre que ce nouvel opus est celui d’un Orelsan assagi, qui a bien grandi et mûri, mais qui reste toutefois fidèle à lui-même. Dans sa première piste, San, il scande « J’regrette mes vieux démons » et pose les bases. Plus le titre progresse, plus on se prend une claque ! Son flow est impeccable, percutant et les quelques notes de pianos sont tout bonnement sublimes. Il nous fait comprendre qu’en prenant de l’âge, il a changé et ne souhaite pas devenir une parodie de lui-même avant de conclure par « Orelsan, part. 3, le dernier volet d’la saga« . Euh… Comment dire ? Après tout juste quatre petites mais puissantes minutes, plongé dans son album, on se questionne : cet opus serait-il le dernier de sa carrière ou uniquement la fin d’un chapitre de sa vie ? La seconde piste nous donnera la réponse ! La fête est finie, qui donne son titre à l’album, nous relate la prise de conscience qu’il n’est plus le jeune rebelle de ses débuts qui pouvait s’éclater sans réellement se soucier des conséquences.

 Je vais dire des trucs simples parce que vous êtes trop cons.

C’est par ces mots qu’Orelsan débute le lead single révélé fin septembre : Basique. Avec une fausse arrogance qu’on lui connait bien, il incite le public à « revoir les bases » sur une instru ultra efficace. Il frappe à coup de vérités simples, basiques. Quelle claque. Son clip filmé en plan séquence et révélé il y a tout juste un mois frôle déjà les 20 millions de vues. Easy. On poursuit avec Tout va bien dans laquelle il énumère des situations dramatiques avec une finesse déconcertante. En effet, il s’adresse à un enfant, lui présentant les aléas de la vie de manière posée et un brin utopiste. Une piste qui nous parle. On s’est tous déjà trouvé dans cette situation où on décide de se poser, de souffler et de se répéter sans cesse « Ça va aller… Tout va bien » afin de relativiser et d’essayer de mettre de côté nos problèmes.

Changement total d’ambiance avec Défaite de famille, un craquage ironique qui critique la société en pointant du doigt quelques clichés plus ou moins réalistes, punchlines après punchlines ! Chacun en prend pour son grade – sauf Janine, sa grand-mère, la star du clip de J’essaye J’essaye – sur un beat parfaitement travaillé par son ami Skread. S’en suit deux chansons dont on se serait bien passé… La lumière ne porte pas si bien son nom. On n’est pas vraiment fan de cette saturation d’autotune… Et l’OVNI intitulé Bonne meuf semble sorti de nulle part et un brin copié sur Bloqué, en moins réussie… Heureusement, Quand est-ce que ça s’arrête arrive à point nommé ! Dans ce huitième morceau, Orelsan dénonce la quête de notoriété qui, pour bon nombre de personnes, est une finalité qui permettrait de résoudre un tas de problèmes. Il conclut qu’être populaire amène également des inconvénients, et pas des moindres !

Quand tu n’es pas connu, tu crois que tout va être super quand tu seras célèbre, mais ce n’est pas tout le temps le cas.

Vient le tour du featuring avec Maître GimsChristophe. On l’avoue, de prime abord on s’attendait à une catastrophe n’étant réellement pas fan de l’interprète de Bella. Mais le résultat est plutôt convaincant. On se laisse aisément prendre par le ton loufoque, désinvolte de cette collaboration ! Une belle critique de la « vieille France » ! Place à Zone, en feat avec deux grands noms du rap game : Nekfeu et le Londonien : Dizzee Rascal. D’emblée on comprend que ce morceau est une réelle bombe ! Avec un flow endiablé et un beat assez dark, on retrouve parfaitement les influences de chaque artiste qui s’entremêlent avec justesse dans ce qui est un des plus puissants tracks de l’album ! On enchaîne avec un brin de nostalgie sur Dans ma ville on traîne où il se remémore les meilleurs moments de sa jeunesse caennaise. Petite subtilité, la chanson se termine sur quelques gouttes de pluies qui introduisent à la perfection sa collab avec Stromae La pluie. On regrette seulement que le Belge ne soit uniquement cantonné qu’au refrain…

Faisons place à nos deux gros coups de cœur de l’album ! Paradis est une sublime déclaration à sa femme, lui prouvant qu’il lui porte un amour sans concession. C’est beau ! Sur une base de classique, il nous fait comprendre que le paradis ne l’intéresse pas car pour lui le vrai paradis est de s’endormir auprès de sa copine chaque soir. On ne saurait vous décrire à quel point cette chanson nous a touchés mais le meilleur reste à venir. En effet, avec Notes pour trop tard et ce durant 7 minutes, Orelsan atteint le summum de l’introspection avec une ballade où il se parle à lui-même, au gamin de 17 ans et demi qui pensait tout connaitre de la vie, à tort ! Ainsi, il met également en garde la jeunesse en leur donnant des conseils réfléchis avec une candeur déconcertante. Les somptueux murmures d’Ibeyi apportent une douceur apaisante qui conclut l’album avec élégance.

Fais d’la merde tant qu’il est encore temps
Pour pas qu’un jour tu te réveilles à quarante ans
Genre : « Putain, j’vais crever mais j’ai jamais kiffé
Ma famille m’empêche de vivre, j’vais devoir les quitter.
En bref

Pour résumer, fini les frasques qui ont fait ses débuts et qui lui ont voulu une polémique avec des textes qualifiés d’outranciers et misogynes. A 35 ans, il a peaufiné sa plume, ses arrangements musicaux et nous régale ainsi avec des chansons audacieuses, sincères, parfois sarcastiques, souvent touchantes. Il met un point d’honneur à faire passer des messages percutants qui poussent à la réflexion. Cependant, les thèmes qu’il traite dans ce nouvel album n’ont rien d’inédit : critique de la société, effets néfastes de la notoriété, amitié et amour, doutes et craintes… Toutefois, ils sont abordés avec un regard différent, plus sereinement, avec une certaine sagesse d’esprit et moins de noirceur tout en gardant la profondeur de ses propos et son ironie grinçante !

L’album démarre en mode gueule de bois, nous fait passer par de multiples émotions, sentiments pour se finir avec une note positive ! Si on pourrait qualifier La fête est finie comme « l’album de la maturité » c’est certainement dû à des punchlines toujours aussi puissantes mais parfois plus subtiles et à des instrus plus posées et définitivement plus travaillées qui frôlent la perfection ! Un cocktail introspectif voire mélancolique, différent de ce dont on avait l’habitude qui risque potentiellement de diviser les fans de la première heure mais qui nus fait avoir une certitude : il marquera le paysage musical français !


Tracklist

1. SAN

2. La fête est finie

3. Basique

4. Tout va bien

5. Défaite de famille

6. La lumière

7. Bonne meuf

8. Quand est-ce que ça s’arrête

9. Christophe (feat. Maître Gims)

10. Zone (feat. Dizzee Rascal & Nekfeu)

11. Dans ma ville, on traîne

12. La pluie (feat. Stromae)

13. Paradis

14. Notes pour trop tard (feat. Ibeyi)

Notre sélection : Paradis, Notes pour trop tard, SAN, Tout va bien

NOTE : 19/20

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