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Interview : Paul CH

Interview : Paul CH

Depuis deux ans on suit de très près la carrière de cet artiste émergent de la scène electronica dont le parcours ne cesse de nous épater. A quelques jours de la parution de son premier EP et de sa release party parisienne, on a pris le temps de discuter avec Paul CH afin de comprendre tout ce qu’il s’est passé ces deux dernières années !

Salut Paul ! On te suit depuis tes débuts avec La Distillerie et on est ravi de discuter avec toi à l’approche de la parution de ton tout premier EP. Pour démarrer cette interview, peux-tu nous confier dans quel état d’esprit tu es en ce moment ?

Et salut ! Alors je ne vais pas vous cacher que je suis pas mal fatigué en ce moment, j’alterne entre une excitation de dingue et du stress vu tout ce que ça représente, aussi bien sur les derniers détails pour la sortie de DISPERSION que de préparer une release party qui soit représentative du travail fourni depuis un an et demi à composer ce disque et surtout qui plaise au public !

C’est vrai que ça ne fait pas beaucoup de temps que tu as démarré ta carrière ! On t’a découvert il y a tout juste  deux ans avec la sortie de ton premier single The Marble, tu as au l’opportunité de jouer lors de la seconde édition de Sous le Radar et on te fait aujourd’hui ta toute première interview !

Pour tout te dire, j’ai commencé ce projet sans prétention, dans mon coin, avec pour ambition première de m’amuser, notamment car ça faisait longtemps que je n’avais pas sorti de musique. A ce moment là, j’avais tout juste deux singles en tête mais aucunement idée que je jouerai au Point Ephémère à peine un an après la sortie de mon premier single… J’ai commencé la production de musique électronique en parallèle de mon activité de sound designer il y peu de temps mais, de fil en aiguille, j’ai rencontré d’autres artistes qui faisaient de l’electronica dans leur coin voire même en live et ça m’a pas mal donné envie d’aller plus loin dans mon projet.

C’est donc majoritairement grâce aux rencontres que tu as faites ces dernières années que tu as décidé de peaufiner ta musique et de voir plus loin ?

C’est ça ! A la sortie de The Marble et Sneaked, je ne savais pas où je voulais aller, ni même si j’avais envie d’aller plus loin. Mais avec le temps j’ai réalisé que ces deux premiers singles définissaient un moment de ma vie mais que j’avais envie de raconter plus de choses, de montrer qui je suis. Et je dois avouer qu’à ce moment-là je n’écoutais pas tant d’electronica, j’avais tout de même des artistes que je suivais de près, Max Cooper, Aleksandir… Mais c’est clairement grâce aux artistes que j’ai rencontrés à l’image d’ABRAN ou de thems que j’ai eu envie d’aller plus loin ! J’ai aussi eu la chance de croiser la route d’Olivier Vasseur, ingénieur du son qui travaille notamment avec le label reliefs records, qui m’a poussé à me poser des questions afin de réellement définir mes envies, ma direction artistique…

Et d’ailleurs ! Qu’est-ce que tu souhaitais raconter à travers ce premier EP, sachant qu’en produisant de la musique instrumentale, chaque auditeur est libre de l’interpréter, de la ressentir d’une manière qui peut parfois différer de l’intention du producteur.

En effet, avec la musique instrumentale, il est assez compliqué de mettre en avant de réelles thématiques. Tu as des artistes qui mettent un nom à leur composition pour parler de quelque chose de personnel, d’autres qui vont trouver un titre assez second degré… Personnellement, je perçois ma musique comme un espace immense à l’intérieur duquel je souhaitais représenter l’infiniment grand et l’infiniment petit qui me passionnent depuis toujours ! Pour l’infiniment grand, je retranscris cela avec des synthés hyper larges, beaucoup de reverbs ; et pour l’infiniment petit à travers des textures organiques, des détails microscopiques. J’adore jouer sur ce contraste là !

Par la suite, j’ai prolongé cette réflexion et l’ai transposée avec l’unité de mesure de l’intensité lumineuse : le lux. Ainsi, chaque morceau reprend un thème relatif à l’espace : Photo pour la lumière en grec, Nebula pour le nuage géant de poussière et de gaz, Quasar pour l’entité la plus lumineuse que l’on connait, Redshift pour le phénomène astronomique du décalage des grandes longueurs d’ondes et Lux pour l’unité dont on parlait !

Cet EP retranscrit bien mes deux dernières années. Il pose une base dont je suis fier mais je pense que la suite sera plus singulière, avec une identité qui sera davantage la mienne et moins inspirée des artistes que j’aime. Tout est encore nouveau pour moi, je suis toujours en train de me définir et j’aime l’idée que mes sorties représentent un Paul CH à un moment donné sans réellement savoir vers où j’irai par la suite !

C’est bien de se focaliser sur l’instant présent pour aussi apprécier tout ce que tu as accompli en peu de temps !

Tout à fait, mais je le fais peu… Même si je suis plus que ravi de mes sorties, de mes dates au Point Éphémère ou encore plus récemment en première partie de Gossi au Pop Up du Label et surtout d’avoir su bien m’entourer, notamment avec Cyril Izarn, le graphiste derrière mes artworks, et Margot Trovo, une jeune photographe très talentueuse avec qui j’ai eu la chance de bosser pour créer mon presskit !

Mais du coup, quelle est l’identité de Paul CH ?

J’ai beaucoup été influencé par les musiques club mais également par l’indie rock, la bedroom pop… J’aime beaucoup les musiques qui transmettent des émotions, qui sont à la fois dansantes et incisives. Mon projet je le trouve introspectif, spacieux et dansant !

Pour parler de production musicale, j’adore les morceaux qui ont des structures évolutives et d’ailleurs j’adore aussi retravailler mes sons dans une version live. J’aime le fait que les gens qui vont écouter ma musique seront tout de même surpris en live. Il y a plus de longueurs, de densité même. Sur certains morceaux que je joue en live, il y a une approche plus club qui apporte une nouvelle dimension à ma musique mais aussi une partie visuelle plus développée ! Vous verrez tout cela le 31 janvier prochain au Pop Up du Label !

D’ailleurs tu nous avais déjà proposé un live audiovisuel lors de ta première date au Point Ephémère. Quel est ton rapport à l’image ?

Alors ça c’est vraiment quelque chose que je souhaite continuer de développer ! J’ai eu la chance de collaborer avec Etienne (ABRAN) et Cyril (ROD-R) notamment sur la dimension visuelle de mon projet, respectivement sur les visuels live et les artworks de mes singles et de mon EP. Je dois avouer que c’est très enrichissant de bosser avec des artistes qui me comprennent et parviennent à retranscrire mes idées avec des images !

Pour ce qui est de mon rapport à l’image, je trouve personnellement qu’un projet musical ne doit pas se dissocier de l’image, notamment dans une société qui est très influencée par les visuels, que ce soit sur les réseaux sociaux et même ailleurs !

Et même à travers le shooting que tu as pu réaliser avec Margot Trovo, une jeune photographe parisienne qui a su retranscrire en quelques clichés Paul CH tout en y apportant sa patte.

Ce qui est chouette quand tu travailles avec Margot c’est qu’elle se met réellement au service de la direction artistique d’un projet, qu’elle comprend ce que tu souhaites faire passer tout en y amenant effectivement sa touche personnelle !

Ca peut être difficile de se livrer à d’autres professionnels qui doivent te comprendre et réussir à aller dans ton sens. Avec la sortie de DISPERSION, il y avait un rapport logique à l’image car l’ensemble de l’EP se veut visuel de base. Et en plus de cet aspect, je souhaitais qu’il y ait une partie de moi qui soit mise en lumière par ces visuels. Pour tout te dire, j’ai perdu mon père il y a deux ans et la composition de cet EP m’a également permis de me libérer… Certes j’avais envie de représenter la lumière qui se diffracte mais aussi d’y avoir du grain qui symboliserait la diffusion, l’éclatement de la matière, comme une âme qui s’égare.

On voit que tu as la chance d’être très bien entouré, et ce dès le début de ton projet. Ca doit être très gratifiant pour toi de voir tous ces professionnels qui t’accordent leur confiance !

Totalement ! C’est fou quand j’y pense. Il y a aussi Félix qui m’accompagne. Il a un projet musical – thems – mais est ingénieur du son de formation et c’est notamment avec lui que je prépare le live.

Vraiment, tous ces humains ça me fait grandir, notamment parce qu’humainement ils sont incroyables mais artistiquement et techniquement aussi ! Je me considère comme un jeune artiste chanceux qui apprend tout le temps ! J’irais mille fois moins vite si je n’avais pas rencontré toutes ces personnes !

Mais d’ailleurs tu as été programmé à Sous le Radar alors que tu n’avais sorti que deux singles !

Oui ! Et ça aussi c’est fou parce que du coup, d’avoir en tête la préparation de mon premier concert, ça m’a obligé à me pousser à fond pour composer des musiques et c’est clairement à ce moment-là qu’est né DISPERSION ! Je pense que ça a pas mal influencé mon processus créatif, notamment sur le fait d’avoir des musiques assez dansantes car je savais que la première fois que les gens les écouteraient ce serait en live directement !

Et du coup, le 31 janvier sera ta première date en tête d’affiche, c’est ta soirée, tu l’as organisée entièrement jusqu’à choisir les artistes qui vont t’accompagner et faire danser ton public tout au long de la nuit !

Cette soirée se déroulera avec Cølibri en première partie, moi en live puis ABRAN Horo en DJ sets ! Honnêtement, ce concert je l’ai organisé comme une fête. J’avais envie de proposer un moment au coeur de l’hiver parisien où les gens peuvent se rassembler, découvrir des artistes de la scène émergente française et danser avec leurs amis. Et le tout à un prix on ne peut plus attractif : 5€ !

Avant de conclure cette interview, on se demandait si tu percevais une différence, toi qui as fait partie d’un groupe d’indie rock, entre cette scène et celle de l’electronica en France.

Yes ! J’étais chanteur et guitariste dans un groupe de mes 15 à 20ans et clairement à ce moment de ma vie, j’écoutais quasiment que de rock, du shoegaze, que ce soit chez moi ou en concert. J’ai découvert la musique électronique sur le tard, vers 2017-2018, avec la house et la techno. J’ai réalise à ce moment que ce que j’appréciais particulièrement dans la musique ce n’était pas forcément de jouer d’un instrument mais plutôt de produire des morceaux, d’être en quelques sortes un chef d’orchestre derrière mon ordi.

C’est rare d’assumer préférer composer sur ordi qu’avec un vrai instrument ! J’ai l’impression que les producteurs de musique électronique sont « forcés » de justifier qu’ils sont instrumentistes de base pour légitimer par la suite le fait de composer de la musique derrière leurs ordis !

C’est vrai ! Et bien que je sois batteur et guitariste, et que mon instrument préféré reste le synthétiseur, mon outil de production de prédilection reste mon ordi ! J’ai besoin de field recording, de textures, de sons samplés pour créer mes morceaux tout en gardant un aspect organique !

Et pour revenir à ma question initiale, trouves-tu qu’il y ait une différence aussi bien sur l’aspect promotion, live ou autre depuis que tu as intégré la scène electronica ?

Tout d’abord, quand tu te présentes à des personnes qui ne connaissent pas ce que tu fais, ils ne comprennent pas… Ils vont te demander si tu mixes ou si tu fais de la techno… Donc c’est à nous, cette scène émergente francophone, de faire comprendre au public qu’il existe d’autres sous genres de la musique électronique et qu’il est possible d’écouter « de l’électro » à toute heure de la journée ! Je pense que cette « éducation » doit notamment se faire par le live, comme ce sera l’occasion le 31 janvier ou comme l’ont fait ABRAN Lydsten avec leur label reliefs records à travers leur release party en commun à La Boule Noire en 2022 !

 

Je pense que le public français est là ! Mais effectivement ça reste assez niche… Mais ce retard peut se rattraper, il suffit que ces artistes soient l’étendard de cette scène ! Tu le vois aussi avec ABRAN qui a notamment collaboré avec ApardeLydsten qui a été poussé via son remix pour French 79, moi qui ai pu avoir la chance de bosser avec thems, il existe un lien et un soutien qui se fait assez naturellement entre nous.

Mais d’ailleurs, toi qui n’es pas parisien de base, tu n’avais pas peur de te sentir illégitime de lancer ton projet et ainsi intégrer cette sphère ?

Comme je te l’ai dit, le projet Paul CH est clairement un accident ! Un très bel accident certes mais je n’avais aucune attente de base donc pas de pression ni de prétention. Dès les premiers morceaux j’ai eu du soutien de quelques professionnels, que ce soit des médias comme La Distillerie Musicale ou encore Musicaleoment Vôtre, des artistes, des techniciens, et du coup ça m’a rassuré ! Pour ce qui est de la légitimé, je pense sincèrement que tout le monde est légitime de faire de la musique car tout le monde a quelque chose à raconter !

Après, pour être sincère, je pense que c’est plus facile de créer les premiers morceaux et que pour la suite la pression se fait davantage ressentir car tu es plus attendu, que même si tu n’as pas une grande audience, il y a des vraies personnes qui écoutent et suivent le projet et donc tu dois réussir à les amener dans une bonne direction, qui te convient mais aussi qui leur fait plaisir !

Et d’ailleurs, on te connait un peu personnellement et on te sait être une personne assez tournée vers l’avenir. Qu’est-ce qu’on peut te souhaiter, et que nous réserves-tu après le 31 janvier ?

Je n’ai pas envie d’avoir cette pression de devoir sortir quelque chose dans la foulée, de sur-exploiter ce premier EP. J’aime bosser quand je le sens, quand les émotions, les idées viennent à moi naturellement. Mais j’ai tout de même très envie de défendre ce projet en live, de le partager à des nouveaux publics à travers des festivals, premières parties et autres ! Pour le moment je suis dans l’énergie de la sortie et j’ai beaucoup à donner !

Après, je ne vais pas te cacher qu’il se peut qu’il y ait un EP de remix de DISPERSION qui arrivera…

On a hâte ! Un grand merci Paul pour cette discussion ! On se voit bientôt en live !

Un grand merci Mathieu, pour cette interview et pour le soutien sans faille depuis le début ! A très vite et si je peux dire un dernier mot en me répétant peut-être : venez le 31 janvier au Pop Up du Label ! C’est une soirée qui a été pensée pour rassembler du beau monde donc on vous y attend avec joie !

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