Nous avons eu la chance de discuter avec Parov Stelar de son nouveau projet. Rassemblement des arts construit autour de nombreuses influences, Voodoo Sonic est sorti le 27 novembre sur le label Etage Noir.
Bonjour ! Tout d’abord, merci beaucoup de nous accorder un peu de temps pour cette interview. Pourrais-tu nous présenter en quelques mots ton projet Voodoo Sonic qui est bien plus qu’une création musicale puisque tu as également réalisé l’artwork de l’album ?
Voodoo Sonic est une production typique car elle contient beaucoup plus que de l’audio ou quelques titres. Je le vois comme un rassemblement de l’art : peinture, vidéo et musique. C’est exactement comme ça que je vois Parov Stelar depuis le début : il ne s’agit pas seulement de musique.
Pourquoi avoir choisi comme nom Voodoo Sonic ?
J’ai regardé un documentaire sur les rituels vaudous et j’ai découvert qu’il s’agissait d’une sorte de religion. C’est un symbole de tant d’influences différentes et je trouvais que ça collait parfaitement avec ce que je fais en musique. J’ai tellement d’influences, du swing à la pop en passant par la soul. Ensuite, j’ai vu l’aspect de la danse, qui est également un aspect très important pour mon projet. J’ai écrit le nom « Voodoo » et je me suis dit « Wow ! C’est beau et ça sonne bien », puis j’ai rajouté le « Sonic ».
Dans quel contexte et état d’esprit cet album a-t-il été composé ?
C’était une sorte de retour à la maison, un retour aux racines de mon projet. Après une longue tournée où j’ai vu tellement de choses différentes j’en ai eu assez de l’électro swing… Je pensais avoir tout dit. Mais, après un certain temps, quand j’ai débuté la composition de Voodoo Sonic, ma passion pour cette musique est revenue : j’étais en transe. Je ne pouvais pas me passer de ces vieilles chansons et de les sampler, ça a été le point de départ. J’étais vraiment heureux de retrouver mes racines.
En parlant de sampling, comment les choisis-tu pour tes morceaux ? Par exemple, j’ai repéré des samples de Benny Goodman dans Crush & Crumble !
C’est surtout par coïncidence ! Je commence à produire un beat et ensuite j’écoute beaucoup de disques. Je mets de côté quelques samples avec la base de mon morceau et parfois j’entends quelque chose et je me dis « ok ce genre de trompettes peut parfaitement s’y adapter ». Mais, cela ne fonctionne pas tout le temps ! C’est vraiment une histoire de coïncidence. Je dis toujours que c’est comme aller à la pêche : tu ne sais pas si tu vas revenir à la maison avec du poisson !
L’identité de Parov Stelar : rassembler des choses qui ne vont pas ensemble.
Tu es aujourd’hui reconnu comme le créateur de l’électro swing mais dans ce projet tu révèles un univers sonore plus large. En écoutant ton album, on se retrouve dans les années 30 avec un titre comme Crush & Crumble, dans un club de jazz avec Piano Boy ou dans un western avec Come Back Home mais il y a aussi des morceaux purement électroniques. Quelles sont tes influences ?
Je pense qu’on peut comparer cela au fait que tous les jours on doit manger quelque chose mais ce serait lassant si on ne mangeait que de la pizza ou que du steak… Chaque jour est différent et parfois je me réveille, je lance ma playlist et réalise que je suis d’humeur à écouter du jazz ou parfois juste à écouter de la pop. Si tu n’es pas d’humeur pour du jazz, je pense que tu ne peux pas produire de titres jazzy. Il s’agit vraiment de ressenti sur l’instant !
Donc, tu as créé cet album en suivant tes sentiments ?
La vie est faite ainsi ! Voodoo Sonic a été un long processus. Pendant deux ans j’ai travaillé constamment dessus. Le projet change de jour en jour et à la fin tu as un tas de morceaux et tu fais ton choix.
De quel morceau es-tu le plus fier ?
Haha ! C’est toujours la question… Et je donne toujours la même réponse : ce sont tous mes enfants donc c’est compliqué de dire lequel j’aime le plus !
Je dirais qu’il y a quelques morceaux qui sont atypiques comme Voodoo Engine. Je l’aime vraiment parce qu’il ne suit aucune règle du monde de la musique actuelle. Aujourd’hui, il n’est pas habituel d’avoir une intro ou des choses de la sorte, il faut aller d’emblée au cœur du morceau. Je suis allé à l’encontre des codes avec ce titre et ça sort de l’ordinaire !
Il y aussi Crush & Crumble qui est pour moi une chanson très énergique qui va vraiment de l’avant. Elle représente assez bien le son et l’univers de Parov Stelar.
Parlons maintenant du clip de Crush & Crumble et de Tango Del Fuego avec des dessins rétro, hyper colorés. Pourquoi ce choix artistique pour ces deux chansons ?
Pour Crush & Crumble, quand j’ai commencé à faire le clip, je réfléchissais à la direction que je voulais prendre. Pour moi, il aurait été trop ennuyeux de représenter la même image que celle que la musique représente. Je dirais que le son de Crush & Crumble est assez rétro, la vidéo aussi mais d’une autre époque : les années 80 avec les néons et les couleurs. A première vue, cela ne correspond pas à Crush & Crumble mais c’est l’identité de Parov Stelar : rassembler des choses qui ne vont pas ensemble.
En ce qui concerne la vidéo de Voodoo Sonic, c’est un style complètement différent !
Oui, c’est vrai, mais c’est un clip que je n’ai pas réalisé moi-même. Il a été fait par un réalisateur à qui j’ai laissé carte blanche. Je lui ai dit « quoi que tu ressentes pour le morceau, vas-y » ! Puis, après avoir vu le résultat, j’ai été plus que satisfait.
Quant à la vidéo de Brass Devil, elle dégage des vibrations positives et nous donne des envies d’évasion. Quel est ton conseil pour s’évader en ces temps difficiles ?
C’est une question difficile… Je pense qu’en ce moment, quand on veut s’échapper de notre quotidien, tout est très compliqué. Il est bon d’avoir un esprit fort parce que si tu passes la journée à regarder Netflix, je ne suis pas sûr de ce qui se passera pour toi après le confinement ou après la fin de la pandémie. Donc, créer et être créatif est une bonne chose que tu peux faire en ce moment.
Donc, c’était plutôt créatif pour toi cette période de confinement ?
Je dirais que oui, surtout en mars et avril qui ont été très productifs et créatifs. Mais, après un certain temps, j’ai réalisé ce que le Covid signifiait réellement… Que ça forçait l’arrêt des concerts… Donc pour le moment tout mon groupe est au chômage…
C’est vraiment important pour nous, musiciens, de présenter notre musique sur scène pour faire vibrer les gens, également pour permettre à de nouvelles personnes de la découvrir ! C’est ce qui manque aujourd’hui.
Vous vous voyez toujours avec les membres du groupe ?
C’est très difficile, de temps en temps sur Skype, mais nous ne sommes pas tous du même pays. Les voyages sont impossibles et nous avons des musiciens venant de la Grèce à la Moldavie jusqu’à New York…
Il ne s’agit pas seulement de musique
Tu es dans la musique depuis plus de quinze ans maintenant. Tu as beaucoup de scènes à ton actif : quel est ton meilleur souvenir de concert ?
Il y en a beaucoup, mais je me souviens d’une scène en France, à la Fête de l’Humanité. C’était bouleversant car nous avons joué devant plus de cent mille personnes ! Quand tu vois tant de personnes en même temps, à tel point que tu n’en vois la fin, c’est une certaine forme d’énergie ! Je ne suis pas sûr que cela se reproduira mais c’était assez impressionnant.
As-tu déjà préparé un concert pour Voodoo Sonic pour les prochains mois, je l’espère, ou même pour un futur plus lointain ?
Oui je travaille déjà sur quelques morceaux à jouer en live dans notre nouveau spectacle. Au moins, avec la situation actuelle, j’ai vraiment le temps de le travailler et de le préparer au mieux.
Pour finir, que pouvons-nous te souhaiter pour la suite ?
Et bien, que la créativité ne s’arrête pas ! Que nous ouvrions à nouveau les frontières et que nous puissions retourner sur scène ! De mon point de vue, c’est l’une des choses les plus importantes !