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Interview : Nikola

Interview : Nikola

Entre la France, le Montenegro, Jacques Brel et Booba, Nikola nous parle de sa musique, et de la pureté qu’il cherche dans sa relation au public. Il réalise les premières parties des zenith de la tournée de Grand Corps Malade.

Hello Nikola, comment est-ce que tu vis le fait de faire une tournée des zéniths directement après la sortie de ton premier album ?

Ça a beaucoup de sens que le moment où je sorte mon premier album corresponde au moment où j’ai l’opportunité de jouer devant autant de gens tous les soirs, je crois que j’ai explosé tous les quotas, en trois zéniths j’ai joué devant plus de monde que sur le reste de ma vie. Mais c’est logique, et c’est génial !

Est-ce que tu peux nous parler du processus d’écriture de ton album ?

Cet album c’est une sorte de voyage initiatique à travers les lieux qui me définissent, et ça s’est totalement imposé à moi. Je ne savais pas du tout que j’allais écrire là-dessus. Je me prenais la tête à ce moment-là et j’ai réalisé que j’avais quelque chose à régler à propos de ça, quelque chose à comprendre. Donc j’ai écrit écrit écrit jusqu’à comprendre petit à petit où ça allait m’amener. En a découlé un album qui ressemble à une trajectoire entres ces lieux qui me définissent que sont Paris, Besançon et le Monténégro.

Comment est-ce que tu as commencé à écrire si tu n’avais pas vraiment de ligne directrice sur ton projet au départ ?

J’écris tout le temps, tous les jours, et après je me relis et quand j’ai envie de faire de la musique, je reprends ces phrases, ces textes. C’est là que j’ai commencé à comprendre. Mais c’est toujours le texte qui vient en premier, parfois il vient sur de la musique, que je remanie beaucoup après. Pour moi la vraie étape de composition elle vient une fois que j’ai le texte, de manière à composer quelque chose qui est vraiment à propos de ce que j’écris.

Entre Besançon et le Monténégro il y a un monde, comment est-ce que tu conjugue les deux sur un projet commun ?

C’était beaucoup une projection, je suis assez persuadé qu’on est définis par notre environnement, par l’endroit où on est. On ne peut pas vraiment se changer soi-même, mais on peut changer d’endroit. Le fait de se projeter dans ces endroits ça faisait sortir des parties de moi différentes, et toute l’idée de l’album, que j’ai compris seulement après, c’était de réussir à relier ces différentes parties de moi.

Chaque entité de texte est attachée à son lieu ?

Il y a certains morceaux qui sont vraiment attachés à ces endroits, surtout trois : Podgorica, Sainte Rita de Paname et Bezac. Les autres morceaux se situent un peu entre ces endroits-là, et ils tirent plus vers l’un ou l’autre de ces lieux.

Il y a aussi beaucoup d’électro dans cet album, qui est pourtant très textuel, comment est-ce que le côté électronique est arrivé dans ton projet ?

Comme je le disais, tout vient du texte, et j’essaye de trouver la forme musicale une fois que je sais de quoi je parle. J’essaye presque de mettre en image avec la musique. Le rôle de l’électro dans l’album c’était de réussir à aller chercher ce qu’il y avait d’humain dans ce qui ne l’était plus. Dans ce qui était déshumanisé par la grande ville, par Paris, par la répétition, les mêmes journées tous les jours… Dans un métro tu vois des gens sortir, et ce sont tous des individus uniques qui ont chacun leur vie, mais c’est aussi un cirque qui recommence tous les jours. Comment est-ce qu’on essaye d’aller trouver un peu de chaleur là-dedans ? L’électro je pense qu’elle a ce rôle-là. Là où le côté plus organique de l’album fait référence à mes racines et à tout ce qui est vraiment vivant.

 

Tu oscilles aussi beaucoup sur ce projet entre la chanson, le rap, le slam presque parfois, comment tu choisis la manière dont tu vas aborder ce texte en chanson ?

Je ne fais pas tellement la distinction, et je pense que ma génération ne fait pas beaucoup la distinction. Pour moi je fais de la chanson française. Parce que j’écris en français et que j’incarne ces textes sur de la musique, à partir de là pour moi c’est de la chanson française. Dans le chant il y a peut-être une certaine pudeur, alors que dans le débit parlé il y a plus une forme d’exutoire. Donc ça dépend de l’intensité et du recul que j’ai sur l’émotion sur le moment. Sur un morceau chanté, je vais plus reprendre, recommencer, alors que la plupart des morceaux « parlés » de l’album ne sont que des « one-shot », j’écris, j’enregistre, et basta !
Il y a plus de recul sur un morceau chanté, qui aura besoin de plus de temps pour se faire et qui parlera peut-être d’émotions qui sont plus compliquées à définir.

Avec quel type de musique est-ce que tu as grandi ?

J’ai grandi en écoutant du rap, je suis né en 2000, forcément… Ma mère, elle, écoutait beaucoup de musique du Montenegro. J’ai voulu mettre des thèmes en musique pour la première fois vers mes 12/13 ans, mais je ne savais pas composer, donc j’ai beaucoup utilisé le sample : trouver une boucle dans une sonorité qui existe déjà pour faire mon texte dessus, et c’est comme ça que j’ai rencontré la chanson française.
Je suis tombé sur la version live à l’Olympia de Ne me quitte pas de Jacques Brel, où il te regarde dans les yeux pendant trois minutes. Moi je cherchais juste une petite boucle et je suis resté bloqué devant lui en me disant « il me parle trop », et à ce moment-là j’ai eu l’impression de découvrir un monde que je ne connaissais pas et en même temps très proche de ce que j’écoutais tous les jours comme Booba, Oxmo Puccino etc…

Les samples de la musique du Montenegro t’ont parlés à ce moment-là ou c’est arrivé plus tard ?

J’allais chercher tout et n’importe quoi, mais la musique du Montenegro remplissait plus l’espace que mes écouteurs. C’était dans la voiture, l’été au pays…

L’album est très mélancolique, et on sent que c’est quelque chose que tu transmets beaucoup. C’est une émotion qui prend beaucoup de place chez toi ?

Pour moi il y a quelque chose de l’ordre du sublime, de prendre des émotions qui peuvent faire mal et d’essayer d’en faire quelque chose de beau, de bienveillant. Si j’écris c’est que j’ai quelque chose à dire, vraiment.

 

Pour les personnes qui t’ont déjà vu, celles qui te verront sur le reste de la tournée de Grand Corps Malade, et sur la tienne après, comment est-ce que tu abordes le public ?

C’est très différent sur un zenith en première partie, ou sur une salle que je pourrai faire seul. Mais sur les zenith, quand le public rentre dans la salle ils ne me connaissent pas, ils ne savent pas qui je suis, ils n’ont jamais écouté ma musique, donc c’est quelque chose de très différent mais aussi de très pur. J’ai 20/25 minutes pour créer quelque chose avec eux et réussir à transmettre et récupérer moi aussi une énergie qui va faire que tous les soirs c’est différent. C’est un exercice très particulier mais qui est très intéressant. C’est juste mes textes, ma manière de les incarner, et la sincérité que j’y met. C’est pur.

 

Merci Nikola !

 

Nikola est à retrouver en première partie de la tournée de Grand Corps Malade, mais aussi prochainement en tournée dans toute la France, il sera le 11 octobre 2024 au Rocher de Palmer. Son premier album MNE, est déjà disponible en physique et sur les plateformes de streaming.
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