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Épisode #6 – L’industrie musicale à l’épreuve du confinement : les managers

Épisode #6 – L’industrie musicale à l’épreuve du confinement : les managers

Œuvrant dans l’ombre, le/la manager est toutefois indispensable car véritable coordinateur et gestionnaire de la carrière d’un.e artiste et de son image. Le rôle central occupé par le/la manager lui permet d’être exposé.e, en première ligne, face aux différents interlocuteurs et partenaires (label, éditeur, tourneur, médias, salles de concerts…) en tant que représentant.e de l’artiste.

Jérémie Charrier (Abel Chéret, Mont Joseph) et Elli Delsart (Fils Cara, 47 ter) ont accepté de répondre à nos questions et de nous expliquer les impacts du confinement tant sur la carrière des artistes en développement dont ils s’occupent que sur leur métier de manager.

Quelques mots pour vous présenter ?

Jérémie : J’ai 32 ans et je vis entre Paris et Nantes. Après une longue expérience comme attaché de presse dans le cinéma, ma première collaboration dans la musique est née il y a deux ans avec le groupe anglais Spang Sisters. J’ai collaboré avec eux dans le cadre du tournage d’un clip, du booking de leurs premières dates françaises et de la promotion de leur EP. Aujourd’hui, j’accompagne plusieurs artistes français, tous auto-producteurs et en développement, que ce soit en qualité de manager et/ou d’attaché de presse.

Elli : Bientôt 30 ans, j’habite à Paris et je travaille avec 47ter en tant que chef de projet et Fils Cara en management.

Comment vos artistes ont-ils vécu cette période de confinement ? Ont-ils réussi  à créer malgré l’enfermement et la privation de liberté ?

Jérémie : L’entrée en confinement à été vécue de manière différente selon les artistes. Certains étaient dans une période chargée avec plusieurs concerts programmés, d’autres devaient finaliser l’enregistrement de nouveaux morceaux et des sorties d’EP étaient prévues avant l’été…

Lorsque tout s’est arrêté du jour au lendemain, ce fut naturellement un coup dur. Mais une fois la situation acceptée, le confinement est rapidement devenu l’occasion pour eux de prendre du recul sur leur projet et d’envisager la suite sous un nouvel angle. Ayant tous une activité professionnelle en plus de la musique, ils ont surtout pris du temps pour eux : ils se sont reposés, ont fait du sport et ont continué d’écrire et de composer malgré, parfois, le peu de moyens techniques et humains pour les épauler.

Elli : J’ai l’impression que chaque artiste a vécu très différemment son confinement. Pour certains, c’était dur de produire des contenus ou de faire des lives ou interviews en live streaming car ils n’étaient pas confinés ensemble… et l’énergie de groupe est nécessaire dans un projet ! Il fallait tout de même faire un peu de promo car la musique continue à exister malgré tout et le public est demandeur. Pour tous les artistes avec lesquels je travaille, le confinement a été bénéfique au niveau de l’écriture et il faut s’attendre à une vague de nouveaux titres à venir 😉

La privatisation de liberté et l’arrêt total des concerts, festivals, etc est vraiment un coup dur… Mais, on va se relever et les artistes vont trouver des idées.

Quels ont été les impacts directs et/ou indirects de cette crise sur le(s) projet(s) de vos artistes et sur votre travail de manager ?

Jérémie : L’impact direct a été l’annulation soudaine de tous les concerts. La scène est une priorité pour les artistes en développement, étant très souvent leur seule source de revenus. C’est aussi un terrain d’expérimentations, de rencontres, d’échanges avec le public et un enjeu très important lorsqu’ils sont amenés à y croiser le regard de professionnels. Cette crise a eu un impact sur la gestion de l’urgence et des priorités. Ensemble, on a pris le temps de discuter des priorités et on a redéfini les prochaines échéances. On s’est aussi laissés imaginer de nouvelles directions artistiques. Mon rôle de manager n’a pas tant changé que ça. Ma priorité étant surtout de soutenir au maximum les artistes et d’être en mesure de répondre au mieux à leurs réponses, leurs craintes ou leurs attentes.

Elli : C’est surtout l’arrêt total des tournées, des concerts, des festivals, etc qui est vraiment un coup dur…

On a forcément un manque à gagner sur ce point. En effet, un artiste en développement comme Fils Cara a besoin de faire des premières parties, de faire des scènes découvertes pour trouver de nouveaux followers et se faire connaitre. A ce niveau-là de carrière, il faut vraiment être persévérant en donnant beaucoup de contenus pour se faire une place. Pour 47ter, c’était le début d’une grosse tournée d’été et de festivals… Leur première grosse tournée… Je vous laisse imaginer la frustration et le nombre de fans déçus.

L’offre sur les réseaux sociaux pendant le confinement était très omniprésente et il fallait se démarquer et mettre les bouchées doubles pour être visible lors de la sortie d’un clip ou d’un nouveau single, en termes d’image, de marketing, de contenus et réfléchir tous les jours avec l’artiste à ce qu’on pouvait faire « d’innovant ».

La musique en elle-même continue de tourner même si les gens ont changé leurs habitudes de la consommer.

Comment envisagez-vous l’après confinement ? On parle d’un embouteillage des sorties et des concerts, qu’en pensez-vous ? Envisagez vous une stratégie différente de celle initialement envisagée ?

Jérémie : Dès le début du confinement, on a commencé à revoir le planning des mois à venir. Certaines deadlines ont été maintenues alors que d’autres ont été reportées. Par exemple, en faisant le pari avec un artiste de maintenir la sortie de son premier EP fin mai, on espère profiter de l’attention du public qui peut être plus importante en ce moment qu’avant le confinement. La rentrée sera évidemment très encombrée, sans réelle visibilité sur la reprise des concerts. Nous réfléchissons donc à la manière d’aborder au mieux l’avenir, sans précipitation.

Elli : Pendant le confinement, nous avons déjà décidé de ne pas sortir l’EP de Fils Cara en mai mais plutôt à la fin de l’été. Comme je le disais plus haut, sur un artiste en développement, il faut aligner toutes les planètes (tour, label, clip, marketing etc..) pour mettre les chances de notre côté et que le projet soit visible.

Pour 47ter, ils sont sur l’écriture d’un deuxième album et pour le moment, nous n’avons pas de date fixe car justement, on attend de voir ce que la rentrée va donner, si les tournées vont être maintenues ou non (beaucoup de dates ont été reportées à la rentrée). Cette période de post confinement est une période de réadaptation qui est en évolution constante. Je pense qu’il faut surtout réfléchir à plusieurs stratégies en parallèle et savoir réagir vite.

Pour terminer sur une note positive, votre dernier mot pour conclure  ? 

Jérémie : Le confinement est devenu une nouvelle source de réflexion, d’échanges et d’inspiration. Je trouve ça super excitant car ils n’ont jamais cessé d’écrire et de composer. Et je vois de très, très belles perspectives. Et un grand merci à La Distillerie Musicale et tous les autres médias qui continuent de soutenir et d’encourager les nouveaux talents. Bisous

Elli : Il y a toujours une lumière au bout du tunnel… Et, j’ai déjà le sourire quand je m’imagine le premier concert où je vais pouvoir aller quand tout va repartir.

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